Si Seulement Cela N’était Pas Arrivé, Ce Chien Serait Normal

Pourquoi certains chiens sont timides ?

Peureux ? Nerveux ? Agressif ?

Irritable ? Hostile ? Difficile à éduquer ?

Collant ? Incapable de rester seul ?

Les gens ont beaucoup d’explications pour lesquelles les chiens agissent comme ils le font.  Parfois, l’historique du chien devient des bagages que les humains portent tout le long de la vie du chien.  Récemment, j’ai posais des questions à quelqu’un au sujet de leur chien qui tirait en laisse et elle a commencé sa réponse par : « Il a été trouvé près d’une benne à ordures quand il n’avait que six semaines. »  Le chien avait maintenant 3 ans.  Comment le fait d’être trouvé près d’une benne d’ordures est-il lié au fait qu’il tire en laisse, qui est une interaction entre un chien et son maître ?

Parfois, l’homme devine ce qui s’est passé. « Un homme avec un chapeau à dû lui taper dessus, car il déteste les hommes qui portent des chapeaux. »   Ou peut-être qu’il trouve tout simplement les chapeaux effrayant ?  Ou peut-être qu’il est incertain d’hommes en général, et le chapeau ne fait qu’ajouter à la frayeur ?  Si une créature d’une hauteur de 10 mètres avec trois têtes et recouvert de vase apparaissait sur votre rue, votre réaction ne serait pas dû au fait que vous avez été abusé par ce type de créature mais plutôt en raison de l’étrangeté, la nouveauté et la méconnaissance de la chose.  Ce qui est attribué à des abus dans le passé du chien peut souvent être expliqué par une socialisation insuffisante et donc avoir une très petite liste de choses connus et familiers, mais une liste énorme de ce qui est étrange, nouveau ou inconnu et donc effrayant.  En revanche, un animal bien socialisé a une énorme liste d’éléments familiers et connus, de personnes et d’expériences.

Cependant, quand nous expliquons le comportement, ce qui est souvent entendu est la suivante :
Si seulement cela n’était pas arrivé…ce chien serait normal.

« Si seulement cela n’était pas arrivé…ce chien serait normale »est au mieux une prémisse erronée.  Au pire, il s’agit d’un rejet de la réalité que les individus varient considérablement dans leurs capacités à gérer ce que la vie nous offre.

« Il aurait été normale » ou « il était normal avant X » — sur la base de quels critères ? Après quel type d’évaluation ? Les éleveurs, éducateurs, personnel de refuges pour chiens et passionnés de chiens n’ont pas une façon détaillée et significative pour évaluer le comportement.  Ils ne mentent pas quand ils prononcent que le chien est « parfaitement normal », mais ils font état d’une opinion fondée sur une évaluation pas suffisamment approfondie.   Sans un compteur Geiger, les bois et les champs autour du site de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl ont l’air tout à fait charmant.

Parfois, ce qui passe pour une évaluation d’un chien est un peu comme l’évaluation de Tchernobyl sans vérifier la radioactivité.

Ironiquement, il y a fréquemment une certaine reconnaissance tacite que tout n’est pas vraiment bien.  Les instructions fournies concernant l’animal révèlent beaucoup.  Cela peut être entendu dans « Oh, il ne faut simplement pas tendre votre bras vers lui [ou essayer de le toucher ou le regarder] et il sera bien. »  Aucun de ces avertissements indiquent un animal qui va très bien, qui peut rester fonctionnelle et approprié et garder ses dents pour lui-même (ou de rester dans la même pièce), même si les humains ressemble ou touchent ou agissent comme des humanoïdes.   Il y a des avertissements qui montrent qu’il y a un risque de problèmes.  Je n’ai jamais vu un panneau qui dit « Attention ! Sol sec avec une bonne adhérence ! »  Personne ne met en garde, « Attention – il va rester détendu et heureux si vous le regardez, l’embrassez ou le touchez. »

« Si seulement cela n’était pas arrivé… » indique souvent des expériences spécifiques que le gens pensent sont à blâmer pour un certain nombre de comportements et réponses qui ne sont pas souhaitables, que ce soit l’anxiété ou la réserve ou l’agressivité ou l’intolérance ou la réactivité.

« C’est parce qu’il a volé sur un avion seul. »
« C’est parce qu’il était dans un refuge. »
« C’est parce que la femme à tendu son bras au-dessus de sa tête. »
« C’est parce que l’homme portait des lunettes de soleil. »
«  C’est parce qu’il y a eu cinq personnes différentes qui l’ont transporté. »

Et ainsi de suite.  En fin de compte, ce qui est cru c’est que cette seule expérience – quelle qu’elle soit – a détruit le chien.

Cela mérite un examen plus détaillé si nous sommes intéressé de faire ce qui est correcte pour les chiens qui nous sont confiés.

L’expérience peut, et va affecter un animal.  Aucune question.  Mais dire que cette expérience est la chose qui peut détruire un individu résistant et stable n’est pas tout à fait exact.  Ce qu’un animal va trouver tellement traumatisant pourrait être simplement un peu confus et ennuyeux pour un autre animal.  Un câlin inattendu d’un enfant trop exubérante peut conduire un chien à simplement attendre patiemment pour que ça se finisse, tandis qu’un autre chien dans cette même situation peut se sentir piégé et va frénétiquement mordre le visage de l’enfant.   Recevoir un câlin n’est pas le problème.  C’est comment le chien ressent le câlin.  Et ça c’est clé : qui est l’individu, et dans quelle mesure une telle expérience l’affecte ?

Chaque chien est le produit de la génétique et de la stimulation développementale (aussi connu sous le nom l’inné) et l’effet cumulatif de ses expériences (parfois appelé acquis).  Quel est le plus influent ?  Les gènes ne sont pas le seul facteur déterminant du comportement ; le comportement n’est pas uniquement le produit de l’expérience.  Bien que les gens « si seulement cela n’était pas arrivé.. » aiment penser autrement, il s’avère qu’il est inutile de choisir entre l’inné et l’acquis.

Dans son livre The Mirage of Space Between Nature and Nurture, Evelyn Fox Keller souligne que les deux sont inexplicablement liés.  Chacun influe l’autre.  Comme Keller le note, il n’y a pas de compréhension d’un mur comme étant purement construit de briques ou purement construit de mortier, tout comme il n’existe pas de battement de  tambour sans le tambour et le batteur.  Il y a une illustration excellente dans son livre qui montre un enfant qui tient un tuyau visé sur un seau, et un enfant à l’autre extrémité du tuyau prêt à tourner le robinet.  Elle demande si  X nombre de litres remplissent le seau, quel enfant a contribué le plus ?  La réponse, bien sûr, est que les enfants et les deux actions (tourner le robinet, tenir le tuyau) sont nécessaires pour remplir le seau.  Ceci,  en bref, est l’argument inné et acquis.

Les animaux varient considérablement dans leur capacité d’adaptation, leur stratégies, leur résistance, leur capacité à demeurer fonctionnel dans une situation, sous un stress à tout moment.  Il y a un énorme écart entre les points d’extrémité du spectre fonctionnel/dysfonctionnel.  Il est utile de le considérer comme un continuum avec plusieurs couches.  Sur chaque couche, un animal peut être plus proche de l’une des extrémités du spectre qu’il serait sur une autre couche.  Par exemple, si l’une des couches est la sensibilité auditive, un chien sourd serait à l’extrémité dysfonctionnelle de l’échelle, mais il peut être parfaitement fonctionnel sur toutes les autres couches. (CARAT vise à évaluer les animaux sur une échelle à plusieurs niveaux qui permet des évaluations finement détaillés.)

A une extrémité du spectre de comportement sont des animaux ayant une capacité limitée à gérer le stress.  Leur comportement peut être rigide, inadapté, inflexible, voire carrément fragile.  Ces chiens peuvent avoir des problèmes de qualité & de vie le long de leur existence en raison de facteurs de stress ou à des stimuli (par exemple, des orages) spécifiques.  Le chien peut avoir une incapacité généralisée à s’adapter qui va affecter le chien tout au long de sa vie dans de nombreux ou même toutes les situations.  Pour ces chiens, il faut veiller à leur fournir le meilleur environnement possible et un style de vie qui évite de créer de détresse pour eux.  Ça peut prendre très peu pour eux de trouver une situation bouleversante ou anxiogène.  Le but de leurs gardiens est de soutenir leurs besoins afin qu’ils puissent fonctionner au plus grand degré possible.  Malheureusement, pour certains de ces chiens, ils peuvent avoir une capacité d’adaptation fortement limité.

A l’autre extrémité du spectre de comportement sont les animaux qui peuvent s’adapter, continuer à fonctionner, qui ont une capacité d’adaptation.  Ces animaux sont les âmes robustes qu’on peut « prendre n’importe où, faire n’importe quoi avec », qui restent très fonctionnel, même dans des situations extrême.  Ils sont capables de récupérer rapidement, même de situations anxiogènes.  Leur comportement est robuste, flexible, adaptable et souple.  Typiquement, ces animaux peuvent se déplacer facilement entre les différents environnements et un éventail de demandes larges sans changements importants dans leur comportement.  Comme ils  peuvent s’adapter à leur environnement, l’environnement n’a pas besoin d’être adapté pour eux.

Ce que nous devons nous concentrer sur est les suivant: les animaux adaptable et résistant auront des expériences très différentes que les animaux fragiles, moins adaptables, même dans exactement la même situation.  Envisagez une visite à la maison des reptiles au zoo.  Si vous aimez les serpents, la maison des reptiles est une expérience merveilleuse plein d’animaux intéressants, et vous profitez de chaque minute de votre visite.  Si vous avez peur des serpents, la maison des reptiles est un endroit effrayant que vous n’aimez pas et vous voulez partir de là le plus rapidement possible.  Même situation, deux expériences très différentes.

Lorsque nous comprenons que tout événement peut ou ne peut pas affecter l’animal en fonction de qui cet animal est, nous pouvons cesser de blâmer un événement en particulier et nous pouvons commencer à comprendre l’animal individuel.  Ensuite, les questions importantes deviennent :

• Comment évaluez-vous la capacité du chien à s’adapter, à fonctionner, à faire face ?
• Comment connaître à quel point l’animal est fragile ou robuste ?

Un indice important de la capacité d’adaptation est la capacité de garder son sang-froid et  la capacité de rester fonctionnelle.  La mesure dans laquelle les fonctions de base sont perturbés nous dit à quel point le stress ou la situation affect l’animal.  Les fonctions de base à prendre en considération sont :

Manger.  Les animaux fonctionnels mangent quand ils ont faim.  Les variations sur la marge du spectre vont de  limiter la consommation d’aliments à la nécessité de nourriture particulièrement alléchantes ou « spéciaux » à la nécessité d’être nourris à la main ou par force à des vomissements ou un refus /désintérêt total de manger.

S’Abreuver.  Les animaux fonctionnels boivent quand ils ont soif et en quantités appropriées.  Les variations sur la marge vont d’une consommation excessive (psychogène ou consommation dû au  « stress », qui peut être lié à une détresse gastrique) à un refus total de boire.

Dormir.  Les chiens fonctionnels dorment environ 12-14 heures par jour.  Les variations sur le spectre quand stressé/en détresse inclus une hyper vigilance qui empêche le sommeil, un sommeil constamment interrompu, un manque de sommeil et un sommeil excessif.

Elimination.  Les animaux fonctionnels urinent et défèquent régulièrement, avec de l’urine correctement concentré et des aliments correctement digérés ainsi que des selles compactes.  Les variations sur le spectre en cas de stress/détresse  vont d’un refus d’uriner ou de déféquer dans des conditions nouvelles (ou « dangereuses ») ou seulement dans des conditions très spécifiques (pas d’humains à proximité, pas de bruits, pas d’autres animaux, etc.) à  une augmentation de la miction et de la défécation à une diarrhée et une incontinence urinaire.

Interactions Sociales. Les animaux fonctionnels sont capables de maintenir leurs aptitudes sociales dans un large éventail de conditions.  Merci de noter : maintenir, et non pas développer !  Un animal qui manque d’aptitudes sociales avec les humains ou d’autres chiens ou tout autre espèce ne peut pas être considérée comme dysfonctionnelle en raison de la circonstance – l’aptitude n’existait pas avant la circonstance.  Les variations sur le spectre en cas de stress/détresse consistent à éviter les interactions,  une irritabilité dans les interactions, être collant, un refus d’être seule (alors que normalement il peut l’être) à une agression pure et simple.

Apprentissage & Réflexion.  Les animaux fonctionnels peuvent utiliser leurs connaissances et aptitudes dans un éventail large de conditions.  Quand le stress/détresse d’un animal augmente, leur capacité d’apprendre ou de réfléchir diminue clairement, un effet notable d’excitation.  Les variations sur le spectre en cas de stress/détresse inclus des réponses lentes ou inexactes, une incapacité légère à importante à répondre correctement aux signaux, une incapacité pure et simple à apprendre ou à effectuer quelque chose.

Le Jeu.  Le jeu est une fonction de haut niveau qui est basé sur la santé physique et le bien-être émotionnel, et en particulier, un sentiment de sécurité dans cet environnement et avec ces congénères de jeu.

Exemple #1 : Le chien est adopté d’une maison à une autre, mais sous deux semaines, déposé dans une pension canine où il passe 10 jours.   De là, il est adopté dans encore une autre maison.  Le chien a continué à bien manger, à boire normalement,  à uriner/déféquer avec un peu de diarrhée légère à quelques reprises, à interagir correctement avec l’ensemble du personnel qui le manipulait ou le sortait, à jouer quand il avait l’occasion, à rester correcte avec les autres chiens et chats de l’établissement.  Sans surprise, ce chien à bien supportait le voyage vers sa nouvelle maison, un voyage de près de 9 heures avec de multiples arrêts et un changement de véhicule et de caisse de transport.  En une journée, ce chien s’est lié fortement avec ses nouveaux propriétaires et a continué à s’adapter sans changements significatifs dans son fonctionnement.

Exemple #2 : Le chien est récupéré d’une situation où il a vécu toute sa vie depuis la naissance.  Lorsqu’il est approché par le sauveteur, le chien devient immobilisé par la peur.  Il ne répond ni à la nourriture, le toucher, les signaux verbaux, la laisse et le collier.  Il doit être porté et placé de force dans la caisse de transport.  A l’arrivée à destination, le chien reste immobile dans la caisse, ne voulant pas sortir même quand la porte est laissé ouverte.  Laissé seul dans la pièce sécurisé avec de la nourriture et de l’eau, et observé uniquement de l’extérieur de la pièce, ça lui prend 3 heures avant qu’il avance vers la nourriture et l’eau placé à quelques centimètres de lui.  Sans surprise, c’est un long chemin pour ce chien avant d’être fonctionnel dans le monde, et quelques années d’effort constants et environnementales.  Il peut encore être poussé vers le dysfonctionnement par des perturbations dans sa routine et avec des personnes non familières.

Exemple #3 : Le chien concourt plusieurs week-ends par mois dans un sport canin.  Le maître veille à amener sa machine à bruit blanc pour la chambre d’hôtel  car sinon le chien ne dort pas et fait les cent pas toute la nuit.  Elle amène aussi des aliments spéciaux parce que le chien refuse souvent de manger pendant le voyage, mais il peut être tenté par des aliments exceptionnels.  Sa trousse de médicaments inclus beaucoup de médicaments anti-diarrhéiques, parce que la diarrhée est fréquente avec ce chien pendant le voyage (il a des selles normales à la maison).  Enfin, elle inclut des suppléments destinés à soulager le stress, parce que le chien est souvent stressé pendant les week-ends de concours.   Lorsqu’on l’interroge sur son chien, ce maître signale que son chien « aime ce sport et les aventures d’expo » qu’ils partagent ensemble.  Sans surprise, elle parle également des difficultés de performance et d’éducation avec ce chien.  Elle est offensée par l’idée que le comportement de son chien montre un degré élevé de stress, le rejetant avec, « Oh, tous les chiens que je connais réagissent de la même manière.  Il est normal ! »

N’importe quel de ces chiens pourraient être évalués en fonction de leur capacité à être fonctionnel  sur tout ou une partie des points le long du chemin : au point de contact initial, pendant le transport, et à la destination finale.  A chaque évaluation, nous avons besoin de savoir :

• A quel point est cet animal fonctionnel ?
• Où est-ce que la fonction est réduit et à quel degré ?
• Est-ce que la fonction dans un endroit est suffisamment réduite pour justifier une intervention médicale ?
• Qu’est-ce qui affecte négativement la capacité de l’animal à fonctionner ?
• Qu’est-ce qui affecte positivement la capacité de l’animal à fonctionner ?

Un animal robuste niveau comportement peut s’adapter beaucoup avant que la situation devient une détresse pour lui.  Un animal avec un comportement fragile ne peut pas gérer beaucoup sans devenir dysfonctionnel.   La même expérience peut avoir des effets très différents sur les individus.   Savoir évaluer un animal en termes de fonctions de base nous permet d’être vraiment plus humains, et nous aide à prendre de meilleures décisions pour eux en tant qu’individus uniques.

Cette évaluation fonctionnelle nous donne un moyen de savoir où l’animal est en ce moment, et nous permet de continuer à évaluer les progrès ou la détérioration sur un niveau très fin, aussi souvent que nécessaire.  La fonctionnalité reflète l’état actuel de l’animal.  Pas ce qu’il pourrait être ou ce qu’il était dans le passé, mais comment il est en Ce Moment.  Le chien vit dans Ce Moment ; évaluez-le en Ce Moment ; soutenez-le en Ce Moment ; éduquez-le en Ce Moment.

Traduit par Corine Graham,
Berger Australiens
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